La pensée visuelle : un langage universel pour les cerveaux atypiques ©

"Je pense en image. Pour moi, les mots sont comme une seconde langue. Je traduis tous les mots, dits ou écrits en films colorés et sonorisés ; ils défilent dans ma tête comme des cassettes vidéo."
— Temple Grandin
Introduction
Et si, pour apprendre, comprendre et mémoriser, il fallait parfois voir plutôt que lire ?
Lors d’un atelier de sciences, un élève avec autisme a réussi à expliquer un mécanisme complexe en dessinant seulement trois schémas simples. Ses mots étaient insuffisants, mais ses images parlaient pour lui.
Chez de nombreuses personnes avec un trouble du neurodéveloppement (TND), notamment celles avec un trouble du spectre de l’autisme (TSA), la pensée visuelle n’est pas un simple style d’apprentissage : c’est leur mode de fonctionnement naturel. Comprendre cette spécificité peut transformer radicalement la manière d’apprendre, de communiquer et d’accompagner.
Même chez les neurotypiques, les images et schémas améliorent la compréhension et la mémorisation. Cependant, chez les personnes avec TND, cette modalité devient souvent un véritable levier d’apprentissage et de communication, parfois indispensable.

Quand le cerveau pense en images
Notre cerveau ne fonctionne pas uniquement de manière linéaire et verbale.
Il traite l’information selon deux canaux principaux : le verbal et le visuel. Allan Paivio, avec sa théorie du double codage (1971), a montré que combiner mots et images multiplie les connexions neuronales et améliore la mémorisation. L’information codée visuellement est plus durable et plus facile à rappeler, car elle active simultanément plusieurs zones cérébrales.
Chez les personnes avec autisme, cette voie visuelle est souvent prédominante. Temple Grandin, autiste et professeure à l’Université du Colorado, explique :
« Je pense en images. Les mots sont comme une seconde langue. »
Les travaux de Kana et al. (NeuroImage, 2016) confirment cette spécificité : lors de tâches verbales, les personnes autistes activent davantage les zones cérébrales liées à la vision, ce qui suggère une préférence cognitive pour les images plutôt que pour le texte ou la parole.
De plus, Mottron et al. (2006) ont montré que certains profils TSA ont une capacité supérieure à mémoriser et organiser des informations complexes lorsqu’elles sont présentées visuellement.
Ces découvertes scientifiques soulignent que les outils visuels ne sont pas accessoires, mais essentiels pour un apprentissage efficace dans ce public.


Pourquoi la pensée visuelle améliore l’apprentissage
Pour les élèves avec TND (TSA, TDAH,Troubles DYS), la pensée visuelle devient un véritable outil de compensation cognitive.
Elle permet :
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Structurer l’information : un mind map transforme une consigne complexe en éléments clairs et hiérarchisés. Par exemple, un élève TSA peut organiser une tâche de maths étape par étape en visualisant les relations entre les concepts.
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Décharger la mémoire de travail, souvent limitée, en externalisant l’information sur un support visuel. Cette approche permet de libérer l’attention pour résoudre des problèmes ou créer des liens entre les idées.
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Rendre concret l’abstrait : les concepts abstraits (fractions, notions grammaticales, structures narratives) deviennent accessibles grâce à la représentation graphique. Une carte visuelle aide à connecter une notion à une image, un symbole ou un exemple concret.
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Maintenir l’attention et la motivation : dessiner, relier, colorier des éléments active la créativité et favorise une implication active, ce qui est particulièrement efficace pour les profils TDAH.

L’étude de Wammes et al. (The Quarterly Journal of Experimental Psychology, 2016) montre que le simple fait de dessiner un concept augmente de 50 % la mémorisation par rapport à l’écriture linéaire.
Cette méthode active plusieurs sens : vision, langage, motricité et émotion, favorisant un apprentissage plus robuste et durable.
« En classe, après quelques cartes mentales, j’ai vu mes élèves TSA s’exprimer beaucoup plus facilement sur leurs idées. »
- Témoignage d’une enseignante spécialisée
Mind mapping et sketchnoting : des méthodes concrètes
Le mind mapping

© Leila BLAL
Le mind mapping, développé par Tony Buzan, repose sur l’organisation associative du cerveau :
Au lieu d’une liste linéaire, les idées sont reliées autour d’un concept central à l’aide de couleurs, symboles et mots-clés.
Ce format reflète la manière naturelle dont le cerveau établit des connexions, favorisant la créativité et la pensée critique.
Exemple pratique : un enseignant accompagne un élève TSA pour rédiger une synthèse sur un chapitre de sciences. Au lieu d’écrire des phrases, ils construisent un mind map, reliant les concepts, illustrations et mots-clés.
L’élève visualise immédiatement le lien entre les idées, ce qui réduit la surcharge cognitive et améliore sa compréhension.
Le sketchnoting
Le sketchnoting combine mots et dessins pour synthétiser visuellement l’information.
Cette technique est particulièrement adaptée aux profils TND qui pensent en images et qui ont parfois des difficultés à organiser un texte linéairement.
Elle permet également de partager ses idées avec d’autres, d’organiser des réunions, ou de préparer des projets tout en réduisant le stress lié à la verbalisation.

© Leila BLAL
Ces méthodes permettent de rendre l’apprentissage ludique et interactif, tout en stimulant plusieurs canaux cognitifs simultanément, ce qui est particulièrement bénéfique pour les élèves avec TND.
Inclusion et autonomie grâce à la pensée visuelle
Utiliser la pensée visuelle dans l’accompagnement des TND ne se limite pas à améliorer la mémorisation. Cela devient un outil d’inclusion et d’autonomie :
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Pour un élève autiste, une carte mentale peut lui permettre d’exprimer ses idées sans passer par le verbal, souvent source de frustration.
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Pour un adulte avec TDAH, elle devient un repère structuré, lui permettant d’organiser ses idées et ses projets sans se sentir dépassé.
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Pour une personne dyslexique, le dessin de concepts facilite la lecture et la compréhension, en offrant une représentation alternative des informations.
Exemple : un adulte TDAH organise ses tâches hebdomadaires avec un sketchnote et réussit à respecter ses deadlines, alors qu’auparavant il était débordé.
En somme, la pensée visuelle valorise la diversité cognitive, renforce la confiance en soi et réduit le stress lié à l’apprentissage.

Se former pour mieux accompagner
Pour exploiter pleinement ces méthodes, TED DYS' School propose avec Leïla Blal, formatrice certifiée Buzan et facilitatrice graphique, une formation immersive sur la pensée visuelle.
Pendant deux jours, les participants expérimenteront :
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Le mind mapping et le sketchnoting,
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La création de pictogrammes simples et efficaces,
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Des exercices pratiques adaptés aux TND,
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L’utilisation des outils numériques pour compléter l’apprentissage visuel.
Chaque participant teste les méthodes sur lui-même avant de les utiliser avec des élèves, ce qui rend la formation très pratique et interactive.
« J’ai commencé à utiliser le sketchnoting avec mes élèves Dys, et j’ai vu une amélioration immédiate de la compréhension et de la motivation. »
— Ancienne participante
Cette formation s’adresse autant aux accompagnants qu’aux enseignants, parents ou professionnels souhaitant mieux comprendre et soutenir les personnes avec TND, mais aussi à toute personne désireuse d’améliorer sa propre manière de penser et de mémoriser.
Parce que pour beaucoup de cerveaux atypiques, penser en images, c’est penser clairement et efficacement.

Pensée visuelle : Explorez la puissance du mind mapping et du sketchnoting !
Références
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Paivio, A. (1971). Imagery and Verbal Processes. New York: Holt, Rinehart, & Winston.
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Kana, R. K., et al. (2016). Brain mechanisms of visual perception in autism spectrum disorder. NeuroImage, 128, 423–436.
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Mottron, L., et al. (2006). Enhanced perceptual functioning in autism: An update, and eight principles of autistic perception. Journal of Autism and Developmental Disorders, 36, 27–43.
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Wammes, J. D., Meade, M. E., & Fernandes, M. A. (2016). The drawing effect: Evidence for reliable and robust memory benefits in free recall. The Quarterly Journal of Experimental Psychology, 69(9), 1752–1776.
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Grandin, T. (2006). Thinking in Pictures: My Life with Autism. Vintage Books.
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Buzan, T. (1993). The Mind Map Book. BBC Books.
Noémie LUMINEL ©
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